Fonta par Charles Perusseaux

A coté de la cohorte des "artistes", qui ont en vue uniquement l'architecture d'un tableau et non l'âme, d'autres qui se contentent de créer un ensemble invertébré, ou d'effectuer des concours de taches, à coté de toutes ces fausses valeurs que l'avenir déjà considère d'un oeil narquois, parce qu'elles ont oublié l'homme en route, Fonta est de ceux, rares, qui ont justement retrouvé l'homme.

"Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m'est étranger"...

Fonta regarde autour de lui. II regarde, et son émotion, il va à la fois la transcrire et la communiquer. Dans maints tableaux ou gouaches, il a déjà affirmé une personnalité pourvue de ces qualités : l'observation passionnée d'un visage, d'un paysage, le sentiment de l'humain et du drame, et puis techniquement, la science des "chauds" et des "froids", des "passages ", enfin l'émotion exprimée par la couleur même. Des clowns, des paysans et des joueurs de cartes peints fortement, dans la tradition des maîtres espagnols, ont émaillé son oeuvre. Récemment Fonta a exécuté tout un ensemble de dessins, dont une centaine ont été selectionnés pour être présentés dans cet album. Le "verbe par le trait" convient bien à Fonta ( II l'avait démontré dans des gravures et dessins précédents ). Une suite de sépias jaillie du pinceau, ou de compositions à la plume font défiler sous les yeux des moulins de Hollande, des paysages de Bretagne ou de Beauce, des maisons blanches et ramassées d'Espagne, sur le seuil des quelles sont assises des paysannes... La technique est variée, selon la vraie compréhension de chaque site . En Ile de France par exemple montre la plume s'attardant à caresser en un foisonnement des arbres calmes. Par contre Fonta exécute très rapidement en sépia un "Paysage d'eau ou une Bourrasque surl a dune". Et la plume à nouveau vagabonde, rapide, pour évoquer des nuages passant dans un grand ciel, qui surplombe une plage.

Fonta a retenu la leçon de Rembrandt à propos du trait qui ne doit pas cerner brutalement un pré, un arbre, un ciel , mais " suggérer", aborder, caresser, en contraste avec l'affirmation puissante d'autres parties du sujet, ce qui accentue les volumes et imprègne l'ensemble de poésie. Les blancs réservés dans des paysages dessinés de Fonta sont étonnants, laissent libre cours à l'immensité;

D'autre part le "Serveur de café" ou le "Clown Pepi" montrent de quelle façon chaleureuse et spontanée, il exprime un visage, ou peut traduire une "gueule" avec un humour caustique - Et  défilent  "François Carbou le poète", le "Musicien", une "Vieille espagnole" au regard farouche... C'est toute une humanité touchante et humble, dont on dirait qu'elle est parfois en proie à l'adversité, qui se retrouve dans "Sur le quai, ou la "Famille pauvre", ou bien des gens courbés affrontant une bourrasque en évoquant des hannetons cheminant, obstinés... Obstinés comme Fonta dans son observation d'une chaumière même délabrée, ou d'un visage même ingrat, pour les magnifier.

                                                                                          Fonta et le dessin par Charles Perrusseaux